Licenciement économique :
L’accord national interprofessionnel
L’accord national interprofessionnel qui est sur le point d’être signé, constitue un bouleversement en ce qui concerne notamment les procédures de licenciement collectif pour cause économique.
Moins de temps pour connaître la cause des licenciements
Actuellement, grâce à l’action des comités d’entreprise, des syndicats et de leurs avocats, lorsqu’une entreprise initie une procédure de licenciement pour motif économique, même si ce dernier est inexistant, les comités d’entreprise peuvent prendre le temps nécessaire à l’examen du projet et obtenir les éléments de réponse utiles.
Ces procédures, sans délais stricts, permettent aux élus d’émettre un avis éclairé et éventuellement d’avoir recours au juge si un certain nombre d’informations leur sont refusées, notamment dans des situations où la cause économique n’est pas réelle et où les licenciements ont une pure motivation financière.
Demain, si l’accord est transcrit dans la loi, les procédures de consultation seront encadrées dans de stricts délais, qui varient entre deux et quatre mois, selon le nombre de salariés dont le licenciement est envisagé.
A l’issue de ce délai, le document de consultation et de plan social est transmis à la Direccte – l’inspection du travail – qui dispose d’un délai de trois semaines pour l’homologuer et à défaut de réponse dans ce délai, le plan est réputé homologué.
Si l’employeur ne recourt pas à la procédure de consultation et d’homologation, il peut conclure un accord collectif majoritaire avec les syndicats ayant recueilli au moins 50% des voix au premier tour des élections.
Dans ce cas, l’intervention de l’administration n’est même pas prévue.
Le tribunal administratif avant les prud’hommes
Actuellement, les salariés peuvent saisir le juge judiciaire (conseil de prud’hommes et cour d’appel) pour être indemnisés.
Demain, c’est l’inspection du travail qui interviendra. Ce qui bouleverse les règles de procédure et de compétence : on change de tribunal.
En présence d’une décision administrative, c’est le tribunal administratif qui devra d’abord être saisi avant toute action devant le conseil de prud’hommes.
Ce n’est que si la décision administrative est annulée que le salarié pourra faire valoir ses droits.
Les délais pour saisir le juge sont, enfin, particulièrement raccourcis : trois mois pour contester la validité de l’accord collectif ou de l’homologation par l’administration, douze mois pour saisir le conseil de prud’hommes (au lieu de cinq ans actuellement).
Au bout du compte, ce sont les entreprises qui sont sécurisées aussi bien en terme de délais que de risque judiciaire.
Risque judiciaire réduit pour les entreprises
D’ailleurs, ce risque judiciaire est « barémisé » puisque l’accord prévoit la possibilité du règlement d’une indemnité forfaitaire .
Cette indemnité forfaitaire est de quatre mois de salaire entre deux et huit ans d’ancienneté, alors que, par ailleurs, le code du travail prévoit six mois minimum.
De même, si l’affaire est jugée par le conseil de prud’hommes, le bureau de jugement doit former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties alors que le texte actuel prévoyait que le doute profitait aux salariés.
Les entreprises pourront en amont, déterminer avec précision la durée et le coût des licenciements par le biais de l’indemnité transactionnelle forfaitaire.
Une entreprise qui supprime des postes mais « reclasse » les salariés en signant un accord majoritaire » sera dispensée de « plan social »
Là, on est dans un autre univers. Ca franchit des années lumière de remise en cause du droit du travail.
Car il s’agit de « mise en œuvre de mesures collectives d’organisation … se traduisant pas des changements de postes ou de lieux de travail au sein de la même entreprise » ! (ANI art. 15). Cela peut donc affecter des services entiers d’une entreprise sans plan social.
Il est précisé qu’en cas de refus d’un poste, le salarié pourra être licencié « pour motif personnel » pas pour « motif économique » !
Les entreprises auront ainsi la possibilité de restructurer sans plan social en imposant aux salariés la « mobilité ».
Les limites « à la mobilité géographique » ne sont pas définies. Elles sont reportées à une autre négociation ! D’une société d’un groupe à l’autre ? « Au delà de la zone géographique de son emploi » ? On ne mesure pas encore l’ampleur de cet autre énorme recul.
Mais une quantité exceptionnelle de situations de menace de « mobilité » forcée, de changement de contrat de travail, vont s’engouffrer là dedans.
Les plans sociaux pourront donc faire l’objet de procédures dérogatoires s’il y a accord majoritaire… avec les syndicats de l’entreprise
Vous lisez bien : le droit du licenciement collectif recule.
Vous lisez bien : le droit du licenciement collectif recule.
Il sera possible de déroger soit par accord avec des syndicats… bienveillants :
- sur le nombre et le calendrier des réunions avec les IRP
- la liste des documents à produire
- les conditions et les délais de recours à l’expert
- l’ordre des licenciements,
- le contenu du plan de sauvegarde
C’est à dire quasiment sur tout (énumération : article 20 -1 de l’ ANI).
On ne contrôle pas les licenciements boursiers, on les permet, s’il y a accord… syndical !
Ca fait logiquement suite aux « accords de compétitivité » précédents.
La loi prévoyait que, dans l’ordre des critères de licenciement, l’ancienneté et la situation sociale arrivaient, de façon protectrice, en premier. Dorénavant selon l’ANI « la compétence professionnelle » sera privilégiée.
Vous lisez bien : le critère social est relégué.
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